Depuis le 11 mai dernier, je reçois en accompagnement de plus en plus de personnes qui se disent marquées par ces deux mois de confinement mais aussi des personnes bouleversées par le déconfinement.
Pour certaines, ces deux périodes sont tout aussi troublantes. Pour d’autres, le confinement a été une période merveilleuse (et tant mieux !) et les choses se sont corsées à partir du déconfinement.
C’est pourquoi dans cet article, je partage avec vous quelques thématiques abordées en séance depuis le début du déconfinement. Et à la toute fin de celui-ci, vous trouverez un exercice à faire pour vous aider dans votre remise en mouvement.
1/ Court-circuit et dépression
Vous l’avez ressenti à votre manière : le confinement a provoqué un arrêt brutal dans nos vies. A contrario, le déconfinement était « censé » nous remettre en mouvement, nous redonner notre liberté en présupposant que tout ceci allait se faire « naturellement ».
Pas si simple … car pour certaines personnes, l’arrêt a été si foudroyant qu’il a provoqué une forme de dépression. Plus rien envie de faire. Un moral -1000. Une énergie mollassonne.
Cette énorme suspension du temps et du quotidien collectif laisse des marques. Nous ne sommes qu’au tout début de notre prise de conscience collective et individuelle de cette période si particulière. Pour la première fois de l’humanité, nous avons tous freiné en même temps des quatre fers et nous nous sommes mis en suspend. Vous vous rendez bien compte de l’énormité et de la puissance de ce court-circuit total ?
« J’ai l’impression que mon âme est en train d’errer quelque part et que je n’arrive pas à reconnecter les bouts pour redevenir à nouveau l’entité qui vit pleinement, qui réfléchit, qui créé, qui ressent… Tout une partie de moi s’est complètement disloquée. »
2/ Dans ma bulle
« Je suis tellement bien dans ma bulle. Vous croyez que c’est grave ? » – ça c’est la question qu’une de mes clientes m’a posée la semaine dernière. Confinement et déconfinement ont été vécus chez elle pratiquement sans aucun contact extérieur – avec bonheur. Et elle se demandait si c’était grave ou pas.
Dans ce cas là, rien d’alarmant car elle semble tout à fait souple sur la question, on est encore dans une « zone de préférence » :
« Je préfère rester dans ma bulle. Mais si je dois faire autrement, je peux toujours le faire ».
Tout est dans le « je peux ». D’autres se sont rendus compte que malgré le déconfinement et l’obligation de sortir de la bulle, le « je peux » n’était plus accessible. Qu’importe les « il faut » ou les « je dois » en face, le « je peux » ne répond plus.
« Je n’arrive plus à prendre le métro » – « Je ne peux plus aller au travail. » – « Je ne supporte plus aucune contrainte » – « Je ne peux plus sortir de chez moi. »
Seule la bulle subsiste.
3/ Peur de perdre à nouveau de vue l’essentiel
J’ai reçu également quelques personnes qui sont venues en séance pour que je les aide à consolider les changements qu’elles avaient commencés à mettre en place toute seule. Que cela soit pendant le confinement ou au début du déconfinement, elles ont réussi à initier des nouvelles habitudes beaucoup plus alignées avec ce qu’elles ont envie d’incarner pour elle.
Une meilleure relation de couple, une disponibilité accrue pour leurs enfants, une routine sportive stimulante, un arrêt du tabac …
« Comment garder les nouvelles bonnes habitudes face au raz-de-marée du quotidien qui reprend ses droits ? J’ai peur de me faire à nouveau avaler par moi-même ou par le système. »
4/ La pression de changer de vie
Pour certain.e.s, le confinement a écorché le statu quo précaire de leur quotidien. Ces deux mois ont été vécus comme un face à face troublant et inconfortable avec eux-mêmes provoquant même parfois une remise en question totale de leur vie.
Par conséquent, le déconfinement a sonné l’heure de dresser le bilan de cette remise en question.
Qu’est-ce que je veux maintenant ? Qu’est-ce que je vais changer à présent ? Comment ? Par quoi je commence ?
La fin du statu quo est acquise mais la suite, comment va-t-elle pouvoir se créer ?
Malheureusement, pour les personnes que je reçois en séance, le post-bilan est loin de se faire calmement. Elles le vivent comme un marasme émotionnel et se mettent une pression énorme pour créer leur nouvelle vie.
5/ Les kilos de confinement
Nous en avons toutes et tous vu passé des images concernant le confinement et la prise de poids. Sous couvert d’humour (à mon sens une grossophobie dissimulée), ces images montrent une méconnaissance cruelle de la souffrance de certaines personnes quant à leur relation avec la nourriture.
Ainsi, je reçois des personnes me demandant de l’aide pour perdre les « kilos de confinement ». Elles sont en proie à une culpabilité terrible d’avoir grossi et de s’ « être laissée aller ». Je les entends s’auto-flageller en se reprochant de ne pas avoir été « assez forte pour ne pas manger, pour ne pas grignoter ». Et elles me montrent même parfois un réel dégoût d’elle-même.
« Mais en même temps, ce putain de paquet de cookies à la fin de la journée c’était et c’est encore MON SEUL réconfort. »
En outre, elles se sentent prises au piège de leur relation avec la nourriture. Car malgré la fin du confinement, les mécanismes compulsifs restent. Et s’ajoute à cela, période estivale oblige, l’injonction du « summer body » (que je trouve personnellement à vomir).
6/ Sur les rotules des rotules
En séance, je retrouve également des personnes en post confinement totalement épuisées. Physiquement, psychiquement, moralement, émotionnellement, il n’y a plus personne.
Elles sont vidées alors même qu’on leur demande avec le déconfinement de redémarrer, d’y aller à nouveau à fond, de remettre tout en marche.
« Comment on fait quand on n’a plus aucune ressource en soi ? »
7/ Retour à la normale vs retour à l’anormal
Ces dernières semaines, j’accompagne également des personnes bouleversées par ce qui leur semble un déni général. Pour elles, la crise sanitaire mondiale était/est un signal d’alarme ultime appelant des changements radicaux. Mais elles se sentent prisonnières d’ « une société qui ne comprend pas ».
Pour elles, le déconfinement a sonné la fin de leurs rêves de changements. L’anormal reprend ses droits. Parfois même, elles me confient que, pour elles, c’est pire qu’avant. Cela les plonge dans une anxiété profonde qui les bloque totalement.
« Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? Ça vous fait rien à vous quand vous voyez ces masques et ces gants par terre en ville ou même sur les chemins en forêt ? J’en peux plus. Ça me dépasse totalement. Et je suis juste hyper triste. »
8/ Injonctions contradictoires et manque de sens
J’accompagne plusieurs personnes qui viennent aussi car elles se sentent pressurisées par des injonctions contradictoires qui provoquent en elles un manque de sens profond. Elles ne savent plus qui croire, quoi faire, comment faire.
J’observe en elle des conflits de parties intérieures qui se déchirent entre le besoin de rester prudent.e et une fureur de vivre.
« Tout va bien. Ah oui, vraiment ? On déconfine à bout de bras, pour relancer l’économie, pour relancer la vie. Et en même temps, restons prudents pour protéger cette même vie. Car finalement, nous ne savons toujours rien. La perspective est trouble. Nous naviguons à vue de nez. Je n’en veux pas de cette vie masquée. Je me sens si frustré et en colère. J’en ai assez de ces injonctions contradictoires. Tout ça n’a aucun sens. »
Ou en encore :
« Au bureau, plus personne ne met de masque. Mais on a des panneaux partout pour nous demander de respecter les gestes barrière. Les métros sont à nouveau bondés sur certains horaires et on est tous collé debout car avec une place assise sur deux qui n’est plus disponible, il n’y a pas de place pour tout le monde. J’ai l’impression que le quotidien est comme avant mais en pire… »
9/ Des deuils encore en cours
Et pour finir, il y a tous ces deuils qui restent encore à faire (décès d’un.e proche, licenciement, interruption brutale d’un projet, rupture amoureuse…). Le déconfinement n’a pas effacé la tristesse, la colère ou le dégoût provoqués par le crise sanitaire mondiale et par le confinement.
Justement c’est parce qu’il y a une remise en route générale que certaines personnes viennent me voir car elles se sentent à présent complètement en décalage. Elles observent la vie reprendre son mouvement et elles se sentent spectatrice sur le bas côté.
« Tout le monde semble avoir repris son quotidien à présent. Et en plus avec les vacances d’été qui arrivent, je sens que les personnes ont juste envie de changer d’air ou d’horizon. Et moi je suis juste là, incapable de décider quoi que ce soit. Car ma vie a perdu son fil, j’ai l’impression de devoir tout recommencer à zéro. Et pour le moment, je n’en ai pas la force ou pas l’envie. »
< Exercice >
Cet exercice a pour objectif de vous aider à vous remettre en mouvement. Il vient écouter les points de tension pour accueillir ce qui a besoin d’être encore accueilli. Mais il tend également à vous mettre dans une perspective d’ « aller vers », de remise en marche en allant chercher le positif de ce qui a été possible pendant le confinement.
A présent, je vous invite à vous mettre si possible au calme. « Calme » veut dire ici dans votre bulle à vous, dans votre espace intérieur. Et prenez de quoi noter.
Première partie
1/ Prenez le temps de prendre une série de 5 grandes inspirations-expirations en vous auto-suggérant que « chaque expiration vous pose de plus en plus sur votre chaise ». Ressentez le souffle qui passe et qui s’en va.
2/ Faites deux colonnes. Dans la première colonne à gauche, écrivez en titre « Ce que le confinement m’a empêché de vivre, de faire, d’être… ». Et listez tout ce qui vous passe par le cœur, l’esprit, les tripes quand vous repensez à ces deux mois de confinement. Restez au maximum présent.e à tous les souvenirs et aux émotions qui vous traversent quand les mots s’inscrivent sur le papier.
3/ Repérez dans la liste l’élément le plus émotionnel pour vous. « Le truc » qui vous touche plus que les autres. Sur un autre papier, déposez tout ce qu’il y a encore besoin de vider concernant cet élément là.
4/ Est-ce de la peur ? De la colère ? De la tristesse ? Du dégoût ? Imaginez que cette émotion est avec vous là tout de suite maintenant et qu’elle peut vous parler. Écoutez-la. Quand vous l’aurez écouté jusqu’au bout, vous commencerez à ressentir quelque chose qui s’apaise en vous. Elle vous aura dit tout ce qu’elle avait à vous dire et elle pourra partir.
Deuxième partie
5/ Dans la deuxième colonne à droite, écrivez à présent en titre « Ce que le confinement m’a permis de vivre, de faire, d’être… ». Et listez tout ce qui vous passe par le cœur, l’esprit, les tripes quand vous repensez à ces deux mois de confinement. Restez à nouveau au maximum présent.e à tous les souvenirs et aux émotions qui vous traversent quand les mots s’inscrivent sur le papier.
6/ Repérez dans la liste l’élément le plus émotionnel pour vous. « Le truc » qui vous touche plus que les autres. Sur un autre papier, déposez tout ce que cet élément vous raconte.
7/ Accueillez les émotions de cet élément. Ressentez tout le positif et rien que le positif. Vous allez prendre à présent une nouvelle série de 5 grandes inspirations et expirations comme pour vous auto-suggérer que « plus le souffle se déploie, plus j’amplifie les émotions agréables » de cet élément là. Comme si vous étiez en train de vous colorier intérieurement de cette énergie là.
8/ Choisissez un geste qui pourra venir ancrer physiquement tout le ressenti agréable que vous êtes en train de déployer là maintenant.
Par exemple, vous pouvez serrer votre poignet gauche avec votre main droite. Et vous auto-suggérez que « mon cerveau avec l’aide de vos processus inconscients est en train d’apprendre que ce geste là est en lien direct avec toutes les sensations et les émotions agréables que je suis en train de ressentir ». Et qu’à chaque fois que vous ferez ce geste là (serrez votre poignet gauche avec votre main droite), vous ressentirez à nouveau toutes ces sensations et émotions agréables.
9/ Sortez de l’expérience en reprenant une série de 5 inspirations et expirations mais cette fois-ci plus dynamiques.
10/ Utilisez à volonté votre ancrage positif, comme un coup de boost réconfortant.
Le mot de la fin
J’espère que cet article aura pu vous faire sentir moins seul.e si cette mise en route générale vous fragilise. Rappelez-vous que ce que nous avons vécu pendant ce printemps 2020 n’est pas du tout anodin. Bien au contraire.
Il va nous falloir nous déconfiner du confinement à notre rythme. Retrouver la vie et que la vie nous retrouve. Et si vous avez besoin d’aide pour y arriver, vous avez le droit de demander de l’aide.
Et j’espère que cet exercice de « déposer-ressentir » vous aura fait du bien. Si vous sentez que pour la première partie, il y a beaucoup d’émotions que vous n’arrivez pas à traverser seul.e, ne forcez pas. Cela veut dire que vous avez besoin d’un coup de pouce d’un.e accompagnant.e et c’est OK.
Je reste à votre disposition pour échanger par mail. Comme toujours, au plaisir de vous lire.